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Les enfants naissent et demeurent libres et égaux en droits...et à l’école?

Jason a 12 ans, il est né et demeure libre et égal en droits que ces camarades de classe. Droits de quoi?

Et bien il a le droit d’apprendre à lire, écrire et à compter dans une école public et gratuite. L’éducation est même une obligation pour lui.

„Il a le droit de bénéficier d’une éducation qui contribuera à sa culture générale et qui lui permette, dans des conditions d’égalité de chances, de développer ses facultés, son jugement personnel et son sens des responsabilités morales et sociales, et de devenir un membre utile de la société“

Ouah! Ça c'est un beau paragraphe, mais il vient de la déclaration des droits de l’enfant de 1959! Mais j’adhère comme tout le monde à l’idée! Jason aussi adhère à cette idée, mais n’ a semble t-il pas pu bénéficier durant son parcours scolaire des conditions d’égalité de chances.

  • Ah bon?

  • Mais oui, je vous assure, il pourrait vous en raconter un rayon. Vous avez un peu de temps? Je peux vous expliquer ce que cela signifie les conditions d’égalité de chances à l’école.

  • Allez y Madame cela m’intéresse, ma fille est dyslexique et la maîtresse me dit toujours qu‘elle ne peut pas rester uniquement sur le cas de ma fille, elle a d’autres élèves en difficulté.

  • Alors l’égalité des chances, c‘est le principe de permettre à chaque enfant d’avoir les mêmes chances de réussite. Dans le cas de l’école, tous les élèves doivent pouvoir obtenir les mêmes chances de réussite dans les mêmes conditions physiques, intellectuelles, psychiques, sociales, économiques.....attendez je m’emballe un peu, en fait il m’est très difficile de vous l’expliquer dans le cas de Jason, 12 ans. Il est également dyslexique, dysorthographique et dyspraxique. En fait, en y réfléchissant les enseignants ont bien appliqué le principe d’égalité entre Jason et ses camarades en classe.

  • Comment cela?

  • Et bien Jason a eu très tôt son diagnostic de dyspraxie, puis au fur et a mesure qu’il avançait ils ont découvert une dyslexie et une dysorthographie. Mais, les instituteurs ont donné les mêmes exercices sur le fond comme sur la forme que ses camarades en classe, il a eu la même quantité d’ exercices, d’écriture à effectuer en classe ou devoirs à la maison. Il a eu les mêmes échelles d’évaluation appliquées par les instituteurs. Il a eu les mêmes tests que ses camarades en classe, les mêmes choses, encore les mêmes, encore et encore...

  • Alors c’ est bien ou ce n’est pas bien?

  • Vous voulez dire est ce que c‘est juste ou ce n'est pas juste? Non ce n‘est pas juste du tout! Jason a un handicap qui affecte ses facultés cognitives. Tous les enfants ne naissent pas égaux socialement, économiquement, physiquement ou psychiquement etc... il y a d’office une différence. Les enfants qui naissent aveugles ne peuvent donc pas accéder à la lecture avec des lettres écrites sur papier. On va donc différencier pour que l’enfant aveugle puisse accéder à la lecture sous un autre format. De même que l’enfant qui a un handicap moteur, on pourra lui assurer un enseignement adapté pour lui permette d’accéder à la même compétence d’écriture que ses autres camarades par le biais de l’ordinateur et les dictées vocales etc etc etc...

  • Vous voulez dire que Jason n’a jamais eu tout ça. Mais pourquoi?

  • Parce que le handicap cognitif est invisible. Il a bien des yeux pour lire, des mains pour écrire, une langue pour parler et un cerveau pour se rappeller. Sauf que „son cerveau n‘ecoute pas ses membres“. Il a bien eu des bribes par ci par là: des agrandissements sur A3 de temps à autre, des couleurs par ci par là. Du temps supplémentaire. Il peut utiliser word en classe pour écrire des mots, mais cela s’arrête à cela. Son ordinateur pendant un examen blanc pour les épreuves communes , lui a été enlevé, sous prétexte qu’il devait faire comme tout le monde. On lui refuse le correcteur orthographique, parce que les enseignants estiment que c’est trop facile, voir même tricher. Mais la dysorthographie existe bel et bien, et elle constitue comme la dyscalculie un handicap très lourd à gérer.

  • Que faudrait-il faire pour Jason pour qu’il puisse obtenir les mêmes chances de réussite puisqu’il n’est pas parti de 0 comme les autres mais de -10?

  • Il faudrait que les enseignants comprennent que les dys ne sont pas un rhume ou un léger trouble qui va se fixer avec le temps. Il faudrait l’ordinateur ou l’Ipad tout le temps en classe et à la maison pour n’importe quelle activité académique qui nécessite l’écriture, les mathématiques pour un dyspraxique, un correcteur orthographique, des livres audio pour les dyslexiques, dysorthographiques. Il faudrait des aménagements visuels, un temps supplémentaire, une secrétaire humaine, une découpe d’exercice de type linéaire etc.etc etc etc....selon la compétence recherchée.

  • Mais les solutions existent alors?

  • Oui elles existent !

  • Ben alors je suis perdue où est le problème ?

  • Le problème c’est que Jason a une maman qui se bat pour obtenir ses aménagement dont il a le droit. Alors que Capucine, qui a 12 ans avec les mêmes dys, habite à 15 km de Jason n’a pas eu ce problème. Elle a eu tous les aménagements dont elle a le droit sans que ses parents n’aient eu à intervenir pour faire valoir ses droits. Il y a aussi le cas d’Alexander, qui a des parents qui parlent difficilement français ou allemand et qui doivent être accompagnés par un traducteur à chaque réunion avec les enseignants.

  • Pourquoi? Mais c’est tout simplement injuste? 3 cas similaires, mais 3 traitements différents.

  • Oui je vous le concède. Tout ceci est injuste et d’autant plus injuste lorsque les parents qui osent parler ou émettre des suggestions, aborder avec les enseignants les solutions qui existent dans les communes/ pays voisins. Et vous n’avez que pour réponse :

  • “Vous pouvez déménager dans la commune qui offre ces aménagements ...”

  • “Je n’ai pas que votre enfant à gérer, il y a d’autres enfants avec des difficultés auxquelles je dois répondre....”

  • “Je n’accepterai pas l’ordinateur ou l’Ipad avec un correcteur orthographique. Je ne vois pas en quoi cela va aider votre enfant à apprendre a écrire correctement les mots. Je lui donne les réponses d’avance et il aura 10/10.

  • “Nous attendons les instructions de la région pour voir les aides à mettre en place”

  • Que peut-on faire alors?

  • Et bien je ferais comme la maman de Jason, si personne ne m’écoute, j’écrirais et rappellerais les droits de mon enfant au médiateur scolaire. La situation de Jason est insupportable et ne doit plus exister au Luxembourg.


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